7 décembre 2016

Les Portes de Fer - Jens Christian Grøndahl



Les Portes de Fer est le déroulement de la vie d'un homme dont on fait connaissance à dix-huit ans et que l'on quitte l'année de ses soixante ans. Le roman est divisé en trois parties dont chacune est consacrée à une période de sa vie; l'adolescence où le narrateur, amateur de la littérature et de Marx, tombe amoureux de la fille de sa prof d'allemand et perd sa mère emportée par un cancer, on le retrouve enseignant et divorcé à quarante ans dans la deuxième partie et dans le dernier volet il est devenu grand-père qui décide de fêter ses soixante ans à Rome. Plusieurs retours en arrière comblent les années qui séparent les trois grands chapitres du roman et on ne perd pas du tout le fil narratif.

J'ai trouvé très intéressant ce portrait que le narrateur dresse de lui-même à travers ses réflexions et ses relations avec les femmes qui ont marqué sa vie: son amour de jeunesse, son ex-femme, ses maîtresses, cette jeune femme rencontrée à Rome, sans oublier sa mère et sa fille. J'ai aimé suivre ce prof amoureux d'art et de littérature, un peu singulier et plutôt solitaire, même s'il m'est arrivé de m'égarer dans les méandres de ses pensées. C'est un touchant voyage sentimental et culturel servi par une écriture agréable d'un auteur danois que je découvre.

C'est Clara qui m'a donné envie de lire ce livre.

✭✭✭✭✩
Une petite parenthèse:
A deux ou trois reprises le nom de Celebidache est cité dans le roman. N'étant pas très grande amatrice de la musique classique, je ne connaissais pas ce célèbre chef d'orchestre roumain. Jusqu'à ce que je rencontre, il y a quelques années, sa femme, Ioana, artiste-peintre dont j'aime beaucoup les tableaux inspirés de l'oeuvre de Paul Klee. Aujourd'hui décédée, elle m'a laissé un souvenir d'une femme drôle, intelligente et surtout d'une grande classe.

Ioana Celebidache Sous le pont Mirabeau
Quelques citations:
Je trouve ça tellement arrogant, toute cette histoire de vie après la mort. Comme si nous n'avions pas déjà de quoi être reconnaissant avec ce que nous avons. Il faut aussi savoir lâcher prise quand l'heure arrive.
Naturellement, il n'y avait rien de surprenant à ce qu'Erica ne ressemble pas aujourd'hui à ce qu'elle était à vingt-un ans. Maria est moi avions également changé au fil des ans, et dans la salle de bains, nous avions noté mutuellement les petites altérations avec confiance et tendresse. Il y avait une certaine clémence dans le fait de voir le déclin arriver graduellement, par petites tranches, comme résultat d'une longue négociation entre la douceur du souvenir et la dureté de la réalité.
Je savais que, au fond du petit enfant, il n'y avait qu'un tas bouillonnant et indifférencié de dispositions et d'aptitudes qu'il fallait guider et former pour se dépasser. Je savais que l'on n'aime pas nécessairement Manet dès le premier coup d’œil. Que l'art, la musique et la littérature, c'est quelque chose que l'on apprend à apprécier.
Quatrième de couverture:

C’est le portrait d’un homme, de ses remords et de ses désirs les plus profonds, que Jens Christian Grøndahl entreprend de brosser en trois moments de vie. Les jeunes années d’abord, la découverte de la littérature et de la langue allemande, l’engagement communiste et la découverte de la sensualité. Un jeune homme romantique et plein d’idéaux, prêt à quitter son confort bourgeois pour rejoindre Erika à Berlin où il découvrira ses premières désillusions. 
Arrive ensuite l’âge de raison, le mariage, la naissance de sa fille Julie, et le divorce. Le narrateur a une quarantaine d’années, il est à présent enseignant et accueille un garçon d’origine serbe dans sa classe. Stanko le fascine mais c’est la rencontre avec la mère du jeune homme qui le trouble encore davantage. Passion à nouveau éphémère qui le renvoie à sa condition d’homme solitaire et de père en alternance. 
À la veille de ses soixante ans enfin, c’est à Rome que nous le retrouvons. Grand-père depuis peu, le narrateur fait une nouvelle rencontre inopinée, avec une jeune photographe cette fois-ci. Elle l’invite chez elle pour lui montrer son travail avant d’accepter de partir avec lui à Paestum, photographier des ruines encore vivantes… 
Les femmes sont omniprésentes dans la vie du narrateur, à chaque basculement dont elles sont souvent à l’origine. Les Portes de Fer parle d’amour et de solitude, mais également du désenchantement de l’individu occidental, de ce drame bourgeois que le grand auteur danois réussit à croquer avec une lucidité et une élégance toutes singulières.

Gallimard - 2016 - 416 pages - traduit du danois par Alain Gnaedig


4 commentaires:

  1. J'ai lu ce livre et bien aimé, mais je me rends compte qu'il ne m'a pas beaucoup marquée. (je n'avais rien écrit à son sujet, d'ailleurs)

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    1. Comme toi, j'ai bien aimé mais ce n'était pas un coup de coeur.

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  2. Grâce à ton billet, je découvre cette peintre. Merci.

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    1. Quand je suis tombée sur le nom de son mari dans ce roman, le souvenir de cette connaissance a resurgi et j'ai eu envie d'en parler.

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